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Majola
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Majola, « petite reine » en polonais

Théâtre Essaïon
Théâtre contemporain
Réserve ta place !

D'après une histoire vraie

Amon Göth, dirigeant du camp de concentration de Plaszow, en Pologne, surnomme sa maîtresse « Majola », ma petite reine en polonais. Son surnom à lui ? "Le boucher d’Hitler". Exécuté par pendaison le 13 septembre 1946, il est reconnu coupable de la mort de huit mille personnes. D’ailleurs, comme en témoigne Poldek Pfefferberg, l’un des juifs sauvés de Plaszow : « Voir Göth, c'était voir la mort. ».

© Stéphanie Gesnel

Mais ce spectacle n’est pas sur Amon Göth. Caroline Darnay, autrice et metteuse en scène, choisit de mettre en lumière la personnalité ambivalente d’Irène Kadler, celle qui a partagé la vie de ce bourreau pendant un an. Est-elle un monstre ? Une criminelle ? Une victime ? Une héroïne ?

La réponse n’est ni simple, ni manichéenne. En effet, surnommée « l’ange de Plaszow », Irène Kadler apaisait par sa seule présence la cruauté d’Amon Göth, le rendant moins violent, moins terrifiant. Plus encore, elle a contribué à sauver des Juif.ves pendant la guerre. Proche d’Oskar Schindler, Irène a pu inscrire plusieurs noms sur les listes, permettant à certains prisonniers d’intégrer l’usine de Schindler, la Deutsche Emailwarenfabrik, spécialisée dans la fabrication de batteries de cuisine en émail, et de survivre, car rappelons-le, l’espérance de vie dans le camp de Plaszow était de 4 semaines.

Cependant, cette héroïsation sonne faux : pourquoi et comment une femme partage-t-elle la vie d’un criminel de cette ampleur ? Peut-on excuser ou comprendre ? Ces questions, Caroline Darnay les explore avec intelligence, à travers une enquête nuancée. Elle incarne Majola avec brio, donnant vie à un personnage complexe, tiraillé entre sa petite histoire et la grande.

© Stéphanie Gesnel

L’intrigue se déroule quarante ans après les faits. Deux journalistes interviewent Majola pour un documentaire sur Oskar Schindler, qui commence à être auréolé de gloire, ce qui culminera grâce au film de Spielberg en 1993. L’un des journalistes est un ancien combattant américain, l’autre un jeune homme d’origine juive. Ces trois trajectoires, marquées par la guerre, finissent donc par se croiser. Mais si cette rencontre avait eu lieu en 1940 ? Force est de constater qu’ils se seraient sans doute entretués pour leur propre survie, ce qui fait froid dans le dos...

Le théâtre Essaïon accueille ce huis-clos avec un décor minimaliste, où tout semble reposer sur le jeu et le texte. Caroline Darnay nous invite à refuser la simplification des jugements, et met en lumière le rôle d’une femme dans l’Histoire, souvent invisibilisées, mais toujours cruciales.

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